Du court au long
Yervant Gianikian
Haut les cœurs ! de Solveig Anspach
Des flammes !
(notes sur trois courts métrages de Patrick Bokanowski)
In Memory
À ceux que le cinéma laisse aujourd'hui indifférents, on voudrait expliquer qu'il réserve encore des surprises magnifiques. Les révolutions techniques et narratives de cet art "nouveau" ont accompagné les bouleverse- ments du monde et l'ont doté d'une archéologie, d'un temps historique à la fois morcelé et foisonnant dont sont empreints les films d'Angela Ricci-Lucchi et Vervant Gianikion. À partir d'archives abandonnées, de bandes anonymes" revisitées", ils parviennent à instaurer un dialogue ouvert avec la mémoire du siècle. Moins une cinéphilie encyclopédique qu'une intuition sur les origines des formes et des idées, le besoin de montrer aussi que le monde déploie une faculté unique à reproduire les tumultes de !'Histoire. Cinéastes inclassables, à l'œuvre déjà riche et pourtant méconnue, les Gionikion étaient les invités de marque du récent Festival Côté Court de Pontin, où fut présenté un échantillon de leurs travaux parmi les plus remar- quables. Leçons d'histoire ou de géographie, documentaires ou films ethnographiques, ils sont un peu tout cela, sans être exacte- ment l'un ou l'autre. Ils ne cessent de nous murmurer qu'il faut "réap- prendre à voir."
Témoigner
Pour la troisième année, le Festival de Clermont-Ferrand s'offre deux grands témoins, personnalités censées rendre compte de l'ensemble de chacune des sélec- tions, l'internationale et la nationale. Ces "témoignages" ont été publiés par les soins du festival en février, les interventions de 1999, pour la première fois, signées par des réalisateurs, le seront pour l'édition 2000. Comme nous avions pu le faire l'an passé avec le témoignage de Gilles Colpart, nous sommes heureux de publier en primeur le point de vue de Jacques Deschamps. Diplômé de l'IDHEC (1980), celui-ci a réa- lisé plusieurs courts métrages, documentaires et fictions, puis, en 1996, un long métrage, Méfie-toi de l'eau qui dort (disponible chez Arte vidéo). Nous remercions chaleureusement l'équipe du Festival de Clermont-Ferrand de nous autoriser à publier ce témoignage et Jacques Deschamps d'avoir pris le temps d'ajuster son texte pour cette publication.
Sortis d’usine d’Hervé Le Roux
Un homme feuillette un album de photographies, reconnaît un camarade, un compagnon de travail. Se demande ce que celui-ci est devenu, sait qu'un autre a trouvé embauche, qui n'a rien à voir avec ce qu'il faisait alors, au temps où cette photo fut prise, dans les ateliers de Renault à Saine-Ouen, en banlieue parisienne.
L’éternel retour du Fantoche (Cohl computerisé)
Parmi les multiples manières d'animer les images, l'informatique a opéré une incontestable percée ces dernières années. Ces technologies de pointe ont aux dernières joutes anneciennes croisé un pionnier de l'animation, Le Fantoche d'Emile Cohl, toujours très combatif, ferraillant en 3D et pourfendant son semblable. Occasion toute trouvée pour évoquer les atouts et les limites de ce nouvel outil.
Comment sortir du cadre ?
Mes fonctions de responsable artistique des Instants Vidéo de Manosque m'amènent à vision- ner chaque année un nombre conséquent de bandes. Je suis à chaque fois étonné de repérer l'émergence soudaine d'imprévisibles tendances. Depuis deux ans par exemple, je constate un intérêt pour des vidéos qui, d'une manière ou d'une autre, se déploient dans un espace fermé, un huis clos, dans un cadre souvent sans profondeur de champ, dans un monde sans perspec- tive ... apparemment. Je reçois ces images en pleine figure, sije peux m'exprimer ainsi. Quand je les découvre sur mon poste de télévision, violemment endiguées comme les eaux tumultueuses d'un barrage hydro-électrique, à peine plus grandes que mon visage, je m'engage à chaque fois dans un tête-à-tête houleux. Je ne les regarde pos, je les dispute, je les discute. Je ne les dévisage pas. Je tente désespérément d'envisager, malgré elles, une issue. Je me figure un possible là où elles paraissent imposer un système de représentation indépassable. Elles méritent de s'y attarder, de les regarder de près, pour se défaire-des apparences. C'est ce que je vous propose de faire ici, en laissant errer notre regard dans et autour des vidéo de Gie- Hee Chang et de Chantal Michel.